Solaris - Stanislas Lem.
Solaris
Traduction : Jean-Michel Josienko
Comme on avait offert à mon mari le film de Sodenbergh
et que celui-ci m'avait laissée sur ma faim (et une fois de plus à me
demander pourquoi, mais pourquoi diable les Américains ne peuvent pas
se dépêtrer : 1) de la culpabilité judéo-chrétienne ; 2) de la
tradition du "happy end" ), j'ai acheté le livre de Stanislas Lem.
Et alors là, par contre, j'ai adoré.
D'accord,
officiellement, "Solaris" est une oeuvre de Science-Fiction. D'accord,
son action se passe dans une station spatiale vouée à l'étude de
l'étrange planète qui fournit son titre au roman. D'accord, Lem utilise
les données habituelles de la SF. Et pourtant, ce roman est en fait
l'actualisation d'une interrogation immémoriale : d'où venons-nous ?
pourquoi sommes-nous là ? ...
J'avoue d'ailleurs être restée
pantoise de constater qu'un écrivain polonais, et donc fortement
imprégné par un catholicisme rétrograde, avait pu se livrer à une
analyse aussi percutante du mystère des origines. Sa formation
scientifique y est certainement pour quelque chose. (Si l'on tient
compte de la richesse de pensées qui fut la sienne, on comprend mieux
pourquoi les religions, quelles qu'elles soient, ont toujours considéré
la Science d'un très mauvais oeil ...)
Tout commence par l'arrivée d'un psychiatre, le Dr Kelvin, à bord de la station spatiale de Solaris où règne désormais un silence presque mortel. Kelvin découvre que l'équipage, initialement formé de trois personnes, Gibarian, Snaut et Sartorius, se résume maintenant aux deux derniers. Mais Sartorius refuse de sortir de sa chambre et c'est Snaut qui apprend à Kelvin le suicide de Gibarian. Visiblement à bout de nerfs, Snaut n'en refuse pas moins d'expliquer à l'arrivant les raisons qui ont poussé Gibarian au suicide. Sous ses sarcasmes, se devine la peur. Mais de qui, de quoi a-t-il peur ? Cela non plus, il ne le dira pas.
Peu
à peu, Kelvin réalise que, pour une raison qui pourrait trouver son
origine dans un bombardement de rayons X infligé à l'océan qui forme
Solaris, les hommes de l'équipage, sortant de leur sommeil, ont vu se
matérialiser des "visiteurs." Des visiteurs de Snaut et Sartorius, nous
ne saurons rien. Pour Kelvin, ce sera sa femme, qui s'était suicidée
après leur rupture. Pour Gibarian, c'était aussi une femme.
On savait depuis longtemps que Solaris avait la faculté de reproduire des objets. Mais jusqu'ici, la planète n'avait jamais engendré des formes aussi exactes et douées d'une vie qui semble bien immortelle ...
Les visiteurs ne semblent pas hostiles mais, évidemment, comment concilier leur présence avec la réalité antérieure ? La Harey qui apparaît à Kelvin et qui dit elle-même ne pas trop savoir ce qu'il lui arrive n'a pas grand chose en commun avec la Harey
morte il y a plusieurs années, sur la Terre. C'est une espèce de clone
dont l'esprit ressemble à un cahier à peine entamé et qui,
malheureusement, souffre de son état.
Plus on avance dans le livre, et plus la souffrance de Harey augmente jusqu'à ce que ...
Inspiré
plus ou moins par la Gnose chrétienne, dévidant avec obstination le fil
d'une logique qui peut paraître désespérée, "Solaris" est un roman
unique qui nous rappelle que la SF, c'est aussi autre chose que "Star
Wars."
Sur Stanislas Lem.
Et un article très intéressant sur un blog.