La Légende de la Mort - Anatole Le Braz.
Anatole Le Braz est ce que l’on est convenu d’appeler un auteur local ou régional.
Il naquit en 1859, à St Servais, petite commune des Côtes d’Armor mais
passa l’essentiel de son enfance à Ploumiliau, dans le Finistère. Petit
détail amusant, son instituteur - le recteur de la paroisse en cette
époque où l’Ecole publique et laïque n’existait pas encore - n’était
autre que l’oncle de Villiers de l’Isle-Adam, auteur connu pour nombre
de récits fantastiques ou pré-sciencefictionnesques comme "L’Eve
Future".
Bon
élève dans un lycée de St Brieuc qui porte aujourd’hui son nom, le
jeune Anatole prépara sa licence de lettres au lycée St Louis, à Paris.
Malheureusement, des problèmes de santé devaient mettre un terme à ses
travaux en vue de l’agrégation de philosophie et l’orienter
définitivement vers le professorat. Il devint d’ailleurs professeur de
philosophie à Quimper, toujours dans le Finistère et ce fut là qu’il se
mit à écrire de nombreux ouvrages sur la Bretagne, ses traditions, ses
paysages, etc ...
Pour
être exact, sa "Légende de la Mort" est plus un recueil de témoignages
et d’histoires vraies que de fabulations et de contes. On y parle
beaucoup de l’Ankou, le Charretier de la Mort breton que l’on doit se
garder soigneusement de croiser sur sa route sous peine de prendre sa
place au 1er de l’An suivant ; des intersignes, signes annonciateurs de
la mort d’un proche ; des fantômes, bien sûr mais aussi de l’Enfer , du
Paradis, de l’Ame et des villes englouties.
Ces
récits sont écrits dans un style des plus simples et, le plus souvent,
ils sont brefs. Ils se lisent donc très facilement. Les connaisseurs en
civillisation celtique pré-chrétienne n’auront aucune peine à constater
que, sous le vernis de la religion
chrétienne et surtout catholique, la Bretagne qu’évoque Le Braz a su
garder intactes ses traditions animistes et merveilleuses que l’on
retrouve par exemple, d’une autre façon, dans les légendes arthuriennes.
Certaines
de mes connaissances, qui ont lu ce livre, l’ont trouvé, je crois,
assez effrayant. C’est vrai qu’il vaut mieux ne pas le lire avant de
s’endormir. Toutefois, si vous ne croyez ni en Dieu, ni en Diable ... ;)
En
tous les cas, ne manquez pas la belle et simple "Séparation de l’Ame et
du Corps" (p. 143 dans l’édition Coop Breizh) où l’Ame dit adieu au
Corps qu’elle a habité si longtemps. Sous la façade chrétienne, ce sont
toutes les interrogations de ces Celtes qu'on surnommait "le peuple du
Crépuscule" - le "crépuscule" étant ici la Renaissance - qui
jaillissent, passionnées et éternelles.
L'Ankou du bénitier - Ossuaire de Saint-Maurice (1639)
Le même - Détail.