La Colline aux suicidés - James Ellroy.
Dernier volume de la trilogie consacrée
à Lloyd le Dingue, cette "Colline aux Suicidés" fait référence à une
colline située dans la banlieue de L.A. et où, dans les années 60, les
jeunes motards avaient pris l'habitude de se fixer des rendez-vous
cinglés, dans le genre de celui qui permet à James Dean, dans "La
Fureur de Vivre", de faire la preuve de son courage - et de sa folie
suicidaire.
Seulement, dans le livre d'Ellroy, les
motos doivent franchir un profond fossé donnant en chute libre sur les
égouts de la ville. Certains y sont morts (la tradition voulait qu'on
prît la précaution d'y jeter au préalable de chaque duel maints objets
coupants et tranchants, style crocs de boucher ou baïonnettes) et ceux
qui en ont réchappé n'ont plus jamais été les mêmes, d'autant que, dans
cette marée putride, se confondent nombre de produits chimiques
hautement toxiques. Qui pis est : il arrivait à beaucoup de ces jeunes
"durs" de tomber quatre ou cinq fois dans le fossé !
A un bout du décor, Ellroy nous plante le sergent Lloyd Hopkins,
toujours aussi tête brûlée et aussi adepte de pureté, que ses
supérieurs hiérarchiques rêvent de mettre à la retraite anticipée en
s'appuyant sur le faux témoignage qu'il a donné pour sauver la vie de
Goff et de sa maîtresse, dans "A cause de la Nuit." Quand débute le
roman, un expert psychiatrique vient de déclarer Hopkins inapte à
poursuivre ses fonctions.
A l'autre bout, un trio de malfrats comme seul Ellroy sait les composer : Duane
Rice, qui ne rêve que de retrouver la femme qu'il aime (et qui ne
l'aime pas, mais il ne le sait pas encore), Bobby Garcia, un ancien
boxeur complètement fêlé qui rêve de meurtres et de viols et Joe, son
frère, un "éternel second", que leur enfance commune auprès d'un père
violent semble avoir lié à tout jamais à Bobby.
Il y a aussi
Meyers, un gardien de prison pour détenus souffrant de troubles
psychiatriques, qui ne vaut pas mieux que ceux qu'il garde et qui
finira trois balles dans le dos, sur le sol d'une banque, pour des
raisons que je vous laisse à découvrir. Kopek, le G-man avec lequel
Hopkins se retrouve en train d'enquêter sur le premier braquage commis
par le Trio infernal. Et bien sûr le vieil ennemi de Lloyd, son
supérieur hiérarchique Fred Gaffeney.
Et toujours, toujours, le spectre de la Rédemption, inlassablement poursuivi par l'un comme par l'autre ... L'atteindront-ils jamais ?
Des
trois volumes de la saga Hopkins, j'ai un faible pour "Lune Sanglante"
et c'est peut-être pour cela que je juge cette "Colline aux suicidés"
un peu plus faible que d'habitude. Je me suis d'ailleurs laissé dire
que la saga Hopkins, initialement prévue avec cinq titres, commençait à
peser à son auteur justement à partir de ce tome. Et, à mon avis, ça se
sent ...) Il existe d'ailleurs un quatrième manuscrit contant les
aventures de ce "flic sans loi" mais Ellroy l'abandonna en cours de
route pour se consacrer au "Dahlia Noir", son obsession.
L'intrigue n'en demeure pas moins passionnante. Cependant, si vous voulez juger sur pièce - ce qui serait la meilleure solution - lisez les trois volumes dans l'ordre.