L'Ile de Sakhaline - Notes de Voyage - Anton Pavlovitch Tchéckhov.
Titre original : ?
Traduction : Lily Denis
L'île
de Sakhaline baigne dans la mer d'Okhotsk, une mer de l'Océan
Pacifique, et voisine étroitement, comme l'indique la carte ci-dessous,
avec la Sibérie orientale :
C'est dans cette île que, en
avril 1890, aborda un Anton Tchékhov bien décidé à rédiger l'histoire
la plus complète qui se pût voir de la colonie pénitentiaire qui y
vivait.
Entre les notes de bas de page et le texte, le tout en format poche Folio, le
tout fait plus de 550 pages, certes passionnantes mais qui pourront
paraître ardues à ceux que n'intéressent guère les moeurs policières et
légales de l'ancienne Russie - que la Russie bolchevique ne fit, en
somme, que récupérer et peaufiner.
Par leur style concis et sans apprêt, ces "Notes de Voyage", étonneront peut-être les habitués du dramaturge. Mais
ils retrouveront sa patte dans ce foisonnement de portraits de forçats,
d'"hommes libres", de "relégués" et de fonctionnaires, tour à tour
incroyables, émouvants, pitoyables, cyniques ..., extraordinaire
galerie où Goya et Doré auraient pu puiser. A l'arrière-plan, les
survivants des peuplades paléo-arctiques comme les Aïnos, qui vivent en
bon terme avec les colons.
Ce que tous partagent et subissent, c'est le climat,
un climat que, en dépit de ses baisses de températures phénoménales, on
peut qualifier d'infernal : neige, glace, hiver quasi perpétuel avec un
été très bref où les températures dépassent rarement les 15 degrés.
Pour
la majorité, une misère lamentable. Pour quelques privilégiés, une
certaine aisance, alimentée par des trafics en tous genres effectués
sur le dos des moins chanceux.
Bien sûr, parmi ceux-là,
beaucoup sont des assassins ou des incendiaires. Mais, comme le
souligne Tchékhov, la condition du bagne à Sakhaline ne leur permet pas
de s'amender de manière efficace. Quant à la colonisation de l'île,
tant souhaitée par les autorités, elle n'est guère réussie puisque, dès
qu'ils ont fait leur temps, les condamnés s'empressent - on les
comprend - de rejoindre le continent.
Un récit
minutieux, scrupuleux, d'une intégrité indubitable, qui, autant que la
philosophie de ses pièces, confirmera au lecteur attentif la profonde
humanité d'Anton Pavlovitch Tchékhov.